Un courage historique

« Monseigneur Adrien de Riedmatten, évêque de Sion , ancien curé de Saint-Martin, accorde de nombreuses franchises aux propriétaires-patriotes de l’Alpage de Loveignoz en guise de souvenir de leurs valeureuses conduites pendant la guerre de la Planta en 1476 » cette citation tirée d’un texte de Monsieur Félix Crettaz, ancien président de cet alpage, nous renseigne déjà sur les qualités de toutes les personnes qui, de près ou de loin,  se sont succédé pour aboutir à cette date, soit le 6 juillet 2008, à l’inauguration de ce centre d’accueil et de promotion des produits régionaux. Cette construction n’est que le témoignage enraciné dans le for intérieur d’une population habitant ou appréciant les zones de montagne. Ces régions d’estivage avec leurs rudesses topographiques donnent la mesure de la volonté humaine. Et de la bonne volonté, il en faut pour perpétuer cette culture alpestre.

L’esprit de solidarité

La longue chaîne humaine partant des patriotes-propriétaires de l’Alpage de Loveignoz, en passant par les comités successifs ayant offert leurs temps pour gérer cet alpage, par les employés qui ont valorisé ces surfaces alpestres grâce aux vaches de la race d’Hérens, de la tachetée rouge, de la Brune en fabricant les produits de qualité tels que le fromage, le sérac en finissant par les propriétaires de fonds exécutant chaque année des heures de corvée pour maintenir les infrastructures dans un état performant a seulement franchi une étape intermédiaire. En effet, la vie des femmes et des hommes se préoccupant des affaires de cet alpage s’apparente à une goutte d’eau dans l’océan. Mais cette goutte d’eau est indispensable dans la construction de l’océan comme est essentielle toute la totale détermination des femmes et des hommes pour construire ensemble un projet servant aux générations futures. Et pourtant, cette volonté unanime du genre humain ne suffit plus.
En effet, les exigences actuelles en matière de financement ont contraint le comité à faire appel à des organismes extérieurs. Partageant les mêmes aspirations en matière de maintien de la culture rurale et de l’entretien du paysage en milieu alpestre, les pouvoirs publics (la Confédération suisse, l’Etat du Valais et la Commune de Saint-Martin) et les organismes privés (l’Aide suisse aux Montagnards, La Loterie romande et le Parrainage COOP pour les régions de montagne) ont contribué à l’édification de cette nouvelle bâtisse. Une telle action mérite la plus profonde reconnaissance de l’ensemble des propriétaires de fonds de l’Alpage de Loveignoz qui ont consacré près de 100 jours de corvées comme contribution propre.

Données générales

 L’Alpage de Loveigoz se situe sur la commune de Saint-Martin au pied de la Maya. Il est la propriété d’un consortage dont les détenteurs de fonds sont au nombre de 172 pour 432 droits de fonds. Actuellement, seulement 3 consorts détiennent encore quelques vaches. La surface totale comprend près de 210 hectares mais la superficie exploitable se monte à 190 hectares, le solde étant composé de forêts et de surface inculte. En termes d’économie alpestre, l’Alpage de Loveignoz compte 87 pâquiers normaux. Un pâquier normal se définit par la surface nécessaire pour nourrir une vache laitière pendant 100 jours. L’inalpe se situe habituellement à la deuxième semaine de juin et la désalpe vers la troisième de septembre. Ces dernières années, environ 85 vaches laitières provenant pour la grande majorité hors du canton du Valais profitent de l’excellent herbage valorisée par une production laitière de près de 55’000 kg dont le 95% est transformé en fromage à raclette au lait cru, la tomme et le sérac font également partie de l’assortiment. Le personnel se compose de 4 à 5 unités. Les tâches particulières sont bien définies. Depuis un quart de siècle, l’Alpage de Loveignoz est en avance sur son siècle puisqu’une dame Mme Lise Es-Borrat loue le domaine alpestre et le gère d’une manière indépendante, à ses risques et périls. Sur le plan des activités, Madame trait les vaches, s’occupe de la fabrication et du soin des fromages. Deux employés participent à la traite, gèrent le troupeau et effectuent les travaux d’entretien des surfaces pâturées tout en participant à des travaux communs. Enfin, une troisième employée s’occupe des tâches domestiques en préparant des menus authentiques qui régalent les visiteurs puisque la réputation a dépassé les frontières locales.

Les deux échelons suivants caractérisent cette exploitation alpestre :

Noms Y / E X / N Altitude Exposition Nombre de jours d’estivage
Prabé 114’006 601’503 1944 ouest 22
Loveignoz 113’300 602’136 2151 ouest 66

Les infrastructures

 L’Alpage de Loveignoz est situé sur un axe de randonnée pédestre et l’accès en véhicule est réservé uniquement aux ayants droit (exploitants et propriétaires de chottes sur l’alpage). Si en 1476, l’évêque de Sion a reconnu les exploits guerriers des propriétaires de fonds de l’Alpage de Loveignoz, la construction des infrastructures est plus récente comme le démontre le tableau suivant :

Année Libellés Coûts en CHF
1964 Construction des étables sur le 2ième niveau (Loveignoz) 318’000.-
1966 Construction des étables sur le 1er niveau (Prabé) 266’000.-
1999 Construction d’une cave à fromage et rénovation des logements 240’000.-
2006 Rénovation du local de fabrication 21’515.-
2008 Construction du centre d’accueil, aménagements extérieurs 225’000.-

 

Pour l’ensemble des investissements, les propriétaires ont participé à hauteur de 40% environ. Si les étables, aménagées simplement avec traite directe, sont surtout utilisées pour la traite, les vaches paissent environ 18 heures par jour sur le pâturage. Les sujets de la race d’Hérens bénéficient d’un traitement particulier puisqu’ils sont attachés durant la nuit. Le logement sur chaque échelon est qualifié de convenable avec cuisine, chambres et WC/douche séparés.

La fabrication du fromage se fait une fois par jour au début et chaque deux jours en fin de saison sur chaque échelon au moyen d’une chaudière en cuivre d’une capacité de 1250 litres. Par contre,l’affinage est totalement réalisé au deuxième échelon, plus précisément à Loveignoz où le volume permet de stocker près de 1250 pièces dans des conditions favorables. Le petit lait est utilisé pour nourrir les porcs durant l’estivage. A n’en pas douter, l’exploitation actuelle de Loveignoz est un cas d’école tant sur le plan économique qu’environnemental.

L’avenir

La politique agricole de 2011, définie par la Confédération, encourage des initiatives privées ou collectives allant dans le sens d’une meilleure compétitivité tout en respectant l’environnement et les animaux. Dans ce sens, les pouvoirs publics soutiennent financièrement  des projets de développement rural régional. La motivation du comité actuel appuyé par les propriétaires de fonds a concrétisé un des objectifs fixés par le développement régional. La réalisation du nouveau bâtiment s’inscrit dans ce contexte. Pourtant, il ne s’agit pas de dormir sur ces lauriers, car notre génération n’est que le  témoin et le dépositaire temporaire de ce qui nous a été légué par nos prédécesseurs. La vie continue et les générations futures ont le droit de disposer d’un environnement riche d’infrastructures performantes et de traditions authentiques, alors ne perdons pas de temps, remettons-nous à l’ouvrage. En effet les défis ne manquent pas, à commencer par une utilisation des énergies renouvelables en zone alpestre afin d’attendre l’objectif «  Zéro pétrole en alpage » !!!

1994, Tiré du producteur de lait, Article complet (PDF)

Plaquette souvenir des travaux de rénovations (PDF)

Présentation, St-Martin, au cœur du Valais central (PDF)

Dépôt provisoire sur cette page de la première page de l’acte en latin datant de 1785 :

Règlement de l’alpage en 1920.

Le comité actuel de l’alpage

Document aimablement fourni par les archives cantonales.

Photo Collection Marius Voide, Bénédiction lors de l’arrivée de la route carrossable à Loveignoz (1959)